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  >  Flâneries   >  Place André-Meunier : l’oublié Fort Saint-Louis

Elle est curieuse cette Place André-Meunier, entre le Cours de la Marne et l’abbatiale de Sainte-Croix. Il n’y a rien de spécial là-bas si ce n’est que le Fort Saint-Louis qui s’y trouvait a été oublié ! Alors qu’on se souvient un peu plus souvent de son acolyte le Château Trompette sous la Place des Quinconces… Que lui est-il donc arrivé ?

Le Château Trompette et le Fort du Hâ ont tous deux été construit à la fin du XVème siècle sous Charles VII, juste après notre incorporation forcée au Royaume de France, respectivement au nord et à l’ouest de la ville. Bien que nous eussions dû changer d’allégeance, nous n’en étions pas moins revanchards, et lors de la Fronde en 1675 Bordeaux se rebella vivement contre le roitelet de Versailles. Qui ne se priva pas de nous mâter en transformant le Château Trompette en forteresse et en renforçant le Fort du Hâ. Toutefois il se douta que cela ne suffirait pas et chargea son ingénieur militaire favori, Vauban, de faire quelque chose de grandiose – équivalente au Château Trompette en aval – à la place de cette petite porte médiévale de Sainte-Croix, refortifiée par un italien en 1535.

Le quartier étant occupé par une abbatiale, un noviciat, deux hospices, trois couvents, un marché, une prison et l’hôtel de la monnaie, ça aurait créer trop de problèmes d’expropriation et de dédommagements financiers pour l’Eglise (les Jésuites reçurent tout de même plus de 13 000 livres pour la perte de leur jardin boisé à prières !).

Le Fort est bâti très rapidement à l’hiver 1675-76 selon les plans de l’architecte Durand. En 1680 Vauban l’inspecte minutieusement, il « tranche, valide, refuse, ajoute », l’année suivante les ingénieurs royaux Ferry et Payen valident les travaux évalués à 6 000 livres. Il se compose d’un chemin de ronde de 9 mètres de hauteur, où un parapet de 2 mètres de haut sur 4 de large permet de placer les canons, au-dessus des trois fossés d’une profondeur de 4,5 mètres. Le Fort Saint-Louis abrite le logement du commandant ainsi qu’une poudrière et diverses constructions. A l’entrée, la Porte Royale ouvre sur un passage qui débouche sur le corps de garde, avec à droite les soldats et à gauche les officiers. A l’ouest se trouve l’écurie du commandant, à l’est un souterrain voûté conduit à une cave puis à une citerne. Un terre-plein longe la courtine, muraille qui relie les deux bastions, Saint-Ignace au nord (sous l’actuel DUT Métiers du Multimédia et de l’Internet) et Saint-Benoit au sud (sous le Musée de l’Imprimerie), sa barbacane d’entrée se trouvait au niveau de la Place André Meunier même.

En 1789, les révolutionnaires s’en emparèrent. En 1807 il faillit être utilisé pour emprisonner les Noirs arrivés clandestinement en France, mais trop délabré le Fort du Hâ lui fut préféré.  Ce Fort ne fut finalement jamais utilisé pour la guerre ! En 1808, Napoléon l’offrit à la ville par décret, qui décida de détruire cette construction inutile et de la remplacer par un abattoir à bestiaux. Ce qui traîna en longueur, en 1820 il était toujours debout mais en friche et seules les parties supérieures avaient disparu. En 1826, le Maire Louis du Hamel, lança un concours pour la construction d’un abattoir communal en lien direct avec le marché aux bœufs des Capucins. En 1831, il fut finalement rasé pour construire l’abattoir à bestiaux, transféré un siècle plus tard sur les quais de Paludate.

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