Sa silhouette fière et majestueuse plantée au milieu des flots est familière à tous les amoureux de la côte Atlantique.
Tour blanche de presque 68 mètres de hauteur, le phare de Courdouan – dixième phare le plus élevé du monde – guide, depuis plus de 4 siècles, les marins venus s’aventurer dans l’estuaire de la Gironde.
Une histoire longue et tourmentée dont l’origine remonte au 14ème siècle. Édouard Plantagenêt, le Prince de Galles, est engagé dans la Guerre de Cent Ans. Il occupe la Guyenne, nom donné à cette province du Sud-Ouest de la France dont la capitale est Bordeaux. Chef de l’armée anglaise, il ordonne la construction d’un phare afin de sécuriser la périlleuse embouchure de la Gironde.
Les travaux commencent sur l’îlot de Cordouan, étroit socle rocheux situé à 7 kilomètres en mer à égale distance des côtes girondines et charentaises. Vers 1360, une tour de 16 mètres émerge. Un ermite est chargé d’y entretenir des feux nocturnes afin de prévenir les navigateurs de passage.
Deux cents ans plus tard, en 1584, Henri III décide de reconstruire le vieil ouvrage usé par l’action mêlée du temps et des éléments. Le chantier est confié à l’architecte Louis de Foix. Ce n’est qu’en 1611, après 25 longues années de travaux, que le « roi des phares » voit enfin le jour. Véritable bijoux d’architecture, il culmine à la hauteur vertigineuse de 37 mètres. Outre la richesse de ses ornements, l’imposant monument, également surnommé « le Versailles de la Mer », est le seul phare au monde à posséder sa propre chapelle.
Au milieu du 18ème siècle, l’édifice, chahuté par les eaux tumultueuses de la Gironde et de l’Océan Atlantique montre de nouveaux signes de fatigue et doit, une fois encore, être restauré. C’est à Joseph Teulère cette fois, que revient la tâche immense de consolider et de surélever le bâtiment. L’ingénieur bordelais relève brillamment le défi et, en août 1790, « le phare des rois », plus grand de 20 mètres, est allumé pour la première fois.
Objet de soins et d’attentions constantes depuis, la sentinelle de Cordouan n’a cessé de servir de repères aux loups de mers et à leurs embarcations. Seul phare de l’Hexagone encore habité, son fonctionnement et son entretien sont assurés par deux duos de gardiens qui s’y relaient tous les quinze jours. Garants désignés de sa mémoire, ils accueillent, chaque année, 20 000 curieux pressés de gravir les 301 marches de son escalier monumental pour admirer, de son sommet, un panorama à couper le souffle.
Témoin impassible de notre histoire commune, le phare de Cordouan, classé monument historique en 1862, vient d’être choisi par l’état français pour être inscrit sur la Liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO.
Le début d’une nouvelle aventure pour ce flegmatique sémaphore qui pourrait donc, en juillet 2020, rejoindre le Mont Saint-Michel et la Cathédrale de Chartres dans la liste, très fermée, des plus beaux sites du monde.
Par Sophie Danger